Alors nous y voilà, au mois de décembre. Au dernier douzième de l'année 2008, l'année internationale de la pomme de terre, l'année de l'élection de Barack Obama, de mes 18 ans, de mon bac et de mon entrée à l'université. 2008, un grand cru, même si je ne pourrai pas savourer correctement son 25 et son 31 décembre.
J'ai appris que Luca avait transmis le relais de la chaîne à trois personnes, dont aucune n'était moi. Je nourrirai une rancoeur sans fin à ton égard, Luca, ouais et je vais même m'intégrer de force en tant que maillon de cette chaîne, c'est-à-dire pour les non-encore-initiés, je vais décrire ci-dessous mes six livres préférés, auxquels j'ajouterai le bonus d'un septième. Parce que je suis une fille d'exception, il faut que je fasse preuve de goûts exceptionnels. Bien sûr que non, Luca, je n'ai pas le temps de m'atteler à ces futilités. Je n'ai pas le temps, mais je le prends, en même temps que ma tasse de café. Je suis épuisée.
Pour en revenir donc à l'objet de cet article qui s'annonce déjà profondément soporifique (mais croyez-le, vous ne connaîtrez jamais vraiment le sens du mot "soporifique" tant que vous n'aurez pas assisté à un cours de chimie au programme PCEM1), je me suis aperçue en établissant la liste des livres, qu'il y en avait peu que j'avais lu sans me comparer au personnage principal. Le personnage principal était souvent une fille, et même sans lui ressembler, j'ai malgré moi souvent évalué ma personnalité par rapport à la sienne. Ne soyez donc point surpris si je me retrouve à parler autant de moi que du livre quand je le commenterai. Et puis, oh, vous me connaissez, je kiffe me taper l'affiche et rasasier mon égocentrisme. Ca me donnera une occasion supplémentaire de déblatérer sur ma personne.
Par ordre chronologique, j'ai donc élu :
A la croisée des Mondes, de Philip Pullman. J'étais à l'école primaire au moment où j'ai entamé la trilogie. C'est le grand coup de coeur littéraire de mon enfance. Lyra, l'héroïne, a sûrement été décisive dans ce qu'est devenu mon idée de la fille parfaite, celle que je voulais devenir. Du culot, de la spontanéité, du charisme, du charme, du courage au service d'une grande intelligence. En clair, un sacré caractère. Notons que quand j'ai voulu relire le premier tome cet été, je n'ai plus retrouvé la magie qui m'avait autrefois arrachée au réel.
S'ensuit la saga Georgia Nicholson. Cette nana, c'est la Bridget Jones des adolescentes. Elle était censée nous décomplexer, seulement voilà elle avait d'après ses dires "une poitrine énorme" et aussi elle plaisait plus aux garçons qu'elle ne voulait le laisser croire. Donc, avec une jolie fille aux conquêtes faciles, il était compliqué pour moi de m'identifier à elle. Par contre, son journal intime est une suite ininterrompue de gags et de catastrophes quant à sa vie sociale, c'était vraiment à pleurer de rire. Je l'ai aussi refeuilleté cet été, et je me suis aperçue que la vie du haut de ses 14 ans était plus remplie que ma vie à 17-18 ans. Frustrant.
Et après, c'est la bascule. La confrontation à la réalité et mon immersion dans un monde cruel.
Tout commence avec Valérie Valère qui relate son séjour dans Le pavillon des enfants fous. Un récit en apnée. Un volonté de fer. C'est l'histoire d'une fille qui arrête de s'alimenter. Mais pas la petite garce d'aujourd'hui qui se proclame "pro-ana" pour mieux être à la mode et qui veut être décharnée parce que "c'est trop beau". Celle qui veut mourir à petit feu pour s'extraire d'un monde qu'elle vomit. Celle qui, fidèle à ses convictions, belle, brillante et lucide, veut disparaître à défaut de voir disparaître les vices intolérables de la tribu Homo-Sapienne. J'ai reconnu en elle la pessimiste torturée, la perfectionniste acharnée. C'était un coup de poing dans le ventre, un livre qui fait réfléchir longtemps après en avoir tourné la dernière page.
Ravage, de René Barjavel. Livre imposé par la prof de français en quatrième. Merci. Au XXI ème siècle, le quotidien repose sur l'électricité de A à Z, dans le monde entier. Une coupure d'électricité inexpliquée et définitive retourne la situation. Plus d'eau, plus de nourriture, plus de moyen de locomotion pour une société qui a perdu l'habitude de marcher et de monter les escaliers de ses gratte-ciel, qui enferme ses défunts dans des chambres froides _ désormais soumis à putréfaction et source d'infections. Effusions de sang, pillages, et affrontements décrits dans un style violent. C'est explicite, c'est de l'horreur bien présentée avec du vocabulaire recherché, des phrases ordonnées, des descriptions d'immondités. C'est puissamment pessimiste, et matière à réflexion sur la personne qu'on serait si c'était la fin du monde. Je sais qu'en ce qui me concerne je serais une pourriture, chacun sa merde. Ou pas. Qui peut le savoir ?
L'accompagnatrice, de Nina Berberova. Cette héroïne est loin de mes idéaux. Elle est moi. Laide, insipide, invisible presque, elle vit dans l'ombre de personnalités éclatantes. Elle est envieuse de tout le monde mais surtout de cette cantatrice, au service de laquelle elle joue du piano. Elle développe une jalousie maladive jusqu'à vouloir détruire le bonheur de ceux qui sont heureux et qui ont ce qu'elle n'a pas. Elle est malsaine, elle est poison. Elle est d'abord rongée de l'intérieur puis elle grignote les autres. Sans qu'on la soupçonne. Et elle s'en tire.
Une vie, de Guy de Maupassant. L'histoire d'une jeune fille de 17 ans qui, à sa sortie du couvent, attend de la vie qu'elle soit intense et trépidante. Cette chère Jeanne s'amourache donc d'un beau jeune homme bien séduisant ma foi, et accepte la demande en mariage, pensant qu'il tiendra les promesses qu'il a faites. Certes non, il ne tiendra pas parole, la ptite ordure. Ce n'est une surprise pour personne sinon pour Jeanne. Sa vie entière sera donc un désastre, tout ça parce qu'un jour elle a cru en l'amour. Pauvre fille. Vie de merde. Pauvre fille.
Je crois que j'ai atteint le quota de livres. J'en ajoute un. Ce n'est pas un roman, c'est une pièce de théâtre. Lue en troisième avec toute la classe. Edmond Rostand a écrit Cyrano de Bergerac, et je le remercie. Lisa aussi. Votez Edmond par SMS au 0123 : 0,50 € + prix d'un sms.